Interview Cycle : Écouter son instinct, comment Audrey Delanoë redéfinit la culture sneaker avec du sens ?

Stratégie créative et marketing produit

 

Quand Audrey Delanoë a quitté son CDI, elle ne s’est pas contentée de changer de métier — elle a répondu à un appel intérieur. Un instinct discret mais tenace l’a menée de la vie en startup à Paris à la création d’iné, une marque de sneakers vegan portée par un style affirmé, des pratiques durables et une conviction personnelle profonde.

« Je savais que je ne pouvais plus continuer à faire un travail qui n’avait plus de sens pour moi », nous confie Audrey. « J’avais besoin de créer quelque chose qui me ressemble, qui soit en phase avec ce que je suis. »

 

Audrey, Fondatrice d'iné

 

C’est justement cette clarté et cette indépendance créative qui nous ont interpellés chez Cycle. En tant que plateforme dédiée à la création engagée et à l’entrepreneuriat éthique, nous avons été séduits par l’énergie d’iné : sans compromis, expressive, profondément ancrée dans des valeurs. Nous avons donc invité Audrey à rejoindre la communauté Cycle, et nous sommes revenus avec elle sur son parcours, de ses souvenirs d’enfance en Bretagne aux salons professionnels de Porto, jusqu’à son rêve d’ouvrir une boutique à Rennes.

 

Elle s’est lancée dans l’entrepreneuriat avec cet état d’esprit :

« C’est un tout nouvel univers, avec sa propre énergie et ses défis. Mais c’est justement ça qui rend l’aventure belle. »

Une nouvelle manière de raconter la sneaker

 

Audrey a lancé iné en janvier 2024, mais les premières graines avaient été semées bien plus tôt. Originaire de Rennes et aujourd’hui installée à Paris, elle a d’abord emprunté un parcours classique : école de commerce à Toulouse, stages en startups parisiennes, stratégie d’entreprise.

Quatre ans après avoir cofondé une société avec un ancien collègue, elle atteint ce qu’elle décrit comme « un tournant silencieux ».

« Je lui ai dit : ‘Je dois partir. Je ne me sens plus à ma place.’ Je ne savais pas encore ce que j’allais faire, mais je savais que je voulais travailler autour de la durabilité et construire quelque chose qui ait du sens. »

 

iné, une marque urbaine et durable, en accord avec la vision d'Audrey

 

Ironie du sort, c’est ce même associé qui lui propose de repartir de zéro, avec cette fois la durabilité comme moteur. Pour Audrey, ce n’est pas juste une seconde chance, c’est le début d’une aventure plus libre, plus créative : celle qui deviendra iné.

Elle se tourne vers la sneaker, non pas par passion pour les modèles collectors, mais pour ce qu’elle représente : une expression du quotidien. 

« Je ne trouvais aucune paire qui corresponde à mes valeurs et à mon style. Les options vegan étaient fades : blanches, plates, sans âme. Je voulais de la couleur, du caractère. Et je voulais aussi savoir comment elles étaient fabriquées. »

De la frustration au premier prototype

 

Le chemin de l’idée au produit a été tout sauf linéaire. Audrey passe près de deux ans à chercher le bon designer, jusqu’à rencontrer Adrien, un créatif engagé dans une démarche de co-création.

« Il fallait que ce soit une vraie collaboration. C’est là que tout a commencé à s’accélérer. »

 

Du premier croquis au prototype finalisé, neuf mois s’écoulent. Audrey ne transige sur rien. Plutôt que d’utiliser des semelles standard, ils décident d’en développer une sur-mesure. C’est plus coûteux, plus long, mais cela leur offre une liberté et une éthique de fabrication totales.

« Le premier moule avait un défaut, on a dû tout recommencer. Un à deux mois de plus. En tout, entre l’idée et le lancement, il s’est écoulé presque trois ans. Mais on l’a fait à notre manière. »

 

Le premier modèle d’iné casse les codes avec une palette vive : orange punchy, vert néon, violet profond. Un hommage visuel au streetwear des années 90.

« J’adorais les années 90, cette époque était libre, sans filtre. Elle m’a donné la permission d’oser. J’étais inspirée par des pièces comme la Nike Challenge portée par Agassi, ou les maillots NBA colorblock que mon père rapportait de New York. Cette énergie est dans notre ADN. »

 

Des sneakers inspirées des années 90 mais aux enjeux modernes

 

Une enfance en bord de mer : là où tout a commencé

 

Les convictions d’Audrey ne sont pas une posture : elles sont intimes. En grandissant près des côtes bretonnes, elle observe dès l’enfance les dégâts environnementaux.

« Un été, les framboisiers du jardin de mon grand-père ont été anéantis par les pesticides. Les plages étaient fermées à cause des algues toxiques. J’ai eu l’impression qu’on avait profané quelque chose de sacré. »

 

Témoin des dégâts de l'activité de l'Homme sur nos territoires, Audrey se promet d'agir

 

Petite déjà, elle récupère tout : bouts de tissu, rubans, boîtes, papiers.

« J’ai toujours détesté le gaspillage. Jeter des choses me paraissait juste… absurde. »

 

Cet état d’esprit guide aujourd’hui chaque choix de matière chez iné. Les sneakers sont conçues avec un matériau composé à 75 % de fibres naturelles, souvent à partir de surplus d’usines.

« On fait avec les contraintes. Moins de couleurs disponibles, ça nous pousse à être plus créatifs. »

 

Sa production est basée au nord du Portugal, une région qu’elle découvre lors de salons pros.

« La région de Porto est très spécialisée dans la sneaker, et beaucoup d’ateliers utilisent de l’énergie renouvelable. C’est essentiel. Ce n’est pas juste le look de la chaussure qui compte, c’est sa fabrication, et l’énergie qui l’alimente. »

 

Distribution, défis et fidélité aux valeurs

 

Comme beaucoup de jeunes marques indépendantes, iné doit relever le défi quotidien de la visibilité. Si l’essentiel des ventes se fait en ligne, la marque est désormais présente dans des boutiques à Paris, Rennes, Lyon et Bordeaux.

« Les gens ont besoin d’essayer, de voir les couleurs en vrai. Le contact physique change tout. On remarque qu’une fois aux pieds, les gens sont surpris par le confort. »

iné voyage en France grâce à ses boutiques partenaires

 

La croissance est aussi pensée avec soin. L’équipe est réduite : Audrey, Matthieu (son ami de longue date), et deux personnes en communication et développement.

« On se parle tout le temps. Je veux que chacun aime ce qu’il fait ici. C’est comme ça qu’on construit quelque chose de durable. »

 

Pas question non plus de brûler les étapes.

« On travaille sur de nouveaux coloris et une petite ligne de chaussettes. Mais pas de nouveau modèle pour l’instant. Je veux que celui-ci soit reconnu, adopté, aimé. »

Conseils aux créatif·ves et entrepreneur·es

 

Le plus grand apprentissage d’Audrey ? Ne pas rester seul·e.

« J’ai trop attendu avant d’aller vers les gens. Dès que j’ai commencé à aller en salons, à échanger, des portes se sont ouvertes. Même sans objectif précis, allez-y, posez des questions. Les gens sont souvent ravis d’aider. »

 

Cette ouverture est au cœur de la philosophie d'iné.

« Il ne s’agit pas de concurrence. Il s’agit de communauté. Si je peux aider quelqu’un, je le fais. On a besoin de plus de ça. »

 

Une vision que partage aussi l’équipe de Cycle. Comme le lui a dit notre co-fondateur Simon Defoort lors de leur rencontre :

« À partir du moment où tu partages, les gens te rendent. Cet effet boule de neige est puissant. »

 

Audrey acquiesce :

« Exactement, c’est un cycle. »

 

Clore le cycle

 

Chez Cycle, nous ne célébrons pas seulement le produit fini, mais aussi le chemin, la démarche, l’engagement sur le long terme. En Audrey, nous avons reconnu ce que nous défendons : le courage de remettre en question les normes, la curiosité de chercher autrement, et la conviction de construire lentement, honnêtement, en profondeur.

Notre échange avec elle a été empreint de cette rare lucidité : celle qui vient quand on écoute son instinct et qu’on honore son propre chemin, même s’il est plus difficile.

« Il y a un moment où il faut juste sauter », dit Audrey. « Même si on ne sait pas ce qu’il y a derrière. »

 

Pour nous, c’est ça, inventer le futur.

À la fin de notre discussion, nous lui avons demandé si elle avait un mantra, une phrase qui la guide.

 

Elle a souri, sans hésiter :

« C’est écrit sur le miroir de ma salle de bain : Écoute ton instinct. Ça ne me dit pas quoi faire, ça me ramène à moi. »

 

Audrey se rappelle quotidiennement l'importance d'écouter son instinct

Dans un monde de mode rapide et de décisions précipitées, Audrey Delanoë fait quelque chose de radical : elle ralentit, elle écoute, et elle construit de l’intérieur.

iné n’est pas juste une marque de sneakers. C’est un signal : il existe une autre manière de créer. Une manière honnête, attentionnée et libre.

Et chez Cycle, on est fier de marcher à ses côtés.

Retrouvez toute l'histoire d'iné dans "Imaginer iné"

Et la première collection de sneakers urbaines et vegan VIBES